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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 1.djvu/79

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— Monsieur, pour vous obéir je siérai donc… Et pour quelle époque vous faudra-t-il cette fourniture ?

— Pour la fin du mois de mars.

— Alors, monsieur, les quatre cent cinquante chemises de très-bonne qualité coûteront sept francs pièce.

— Eh bien ! d’honneur, c’est très-bon marché, cher monsieur Lebrenn… Voilà, je l’espère, un compliment que les acheteurs ne font pas souvent, hein ?

— Non, point très-souvent, il est vrai, monsieur. Mais vous m’aviez parlé d’autres fournitures ?

— Diable, mon cher, vous ne perdez pas la carte… Vous pensez au solide.

— Eh ! eh ! monsieur… on est marchand, c’est pour vendre…

— Et, dans ce moment-ci, vendez-vous beaucoup ?

— Hum… hum !… couci… couci…

— Vraiment ! couci… couci ? Eh bien, tant pis, tant pis, cher monsieur Lebrenn. Cela doit vous contrarier… car vous devez être père de famille ?

— Vous êtes bien bon, monsieur… J’ai un fils.

— Et vous l’élevez pour vous succéder ?

— Oui-dà, monsieur ; il est à l’École centrale du commerce.

— À son âge ? ce brave garçon ! Et vous n’avez qu’un fils, cher monsieur Lebrenn ?

— Sauf respect de vous contredire, monsieur ; j’ai aussi une fille…

— Aussi une fille ! ce cher Lebrenn. Si elle ressemble à la mère… elle doit être charmante…

— Eh ! eh !… elle est grandelette… et gentillette…

— Vous devez en être bien fier. Allons, avouez-le.

— Trédame ! je ne dis point non, monsieur ! point non je ne dis.

— C’est étonnant (pensa M. de Plouernel), ce bonhomme a une manière de parler singulièrement surannée ; il faut que ce soit de tradition dans la rue Saint-Denis ; il me rappelle le vieil intendant Ro-