Aller au contenu

Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que chacun disait de lui émurent Joséphin, susceptible de sentiments généreux malgré sa vie d’aventures ; aussi, voyant le religieux, après de nouveaux remerciements adressés à Christian, se diriger vers la porte, le franc-taupin prit son épée, son chapeau, et dit :

— Mon révérend, vous ne vous en irez pas seul ; je vous accompagne jusqu’aux Augustins. Le propre des horions reçus en plein crâne (et voire ! mon bonnet sait si j’en ai reçu…) est souvent de causer plus tard des étourdissements… donc, vous pouvez être surpris en route par un étourdissement… donc, je vous offre mon bras… donc l’accepterez…

— Merci, Joséphin, — dit affectueusement Brigitte, — merci de ta secourable pensée, mon ami !

— Je vous suis obligé de votre offre, — répondit le moine au franc-taupin ; — mais je ne souffrirai pas que vous vous donniez la peine de me reconduire ; ma robe me protégera suffisamment contre les rôdeurs de nuit.

— Votre robe ! Si je ne savais quel digne homme est dedans, je la laisserais s’en aller toute seule ; ventre saint Quenet ! je n’aime guère les moines (j’entends les moines moinant, moinaudant…) ; car vu que le singe ne garde pas la maison comme le chien, ne tire pas la charrette comme le bœuf, ne porte pas le faix comme le cheval…

— Joséphin, — dit vivement Brigitte, craignant que la comparaison à laquelle se livrait le franc-taupin ne blessât le jeune religieux, — tu oublies que…

Mais Joséphin, sans écouter sa sœur, continua imperturbable :

— Or, semblablement au singe inutile, un moine (j’entends toujours un moine moinaudant, et vous n’êtes point de ceux-là, mon révérend), un moine ne laboure comme le paysan, ne défend la contrée comme le soldat, ne guérit les malades comme le médecin, ventre saint Quenet ! Ces frocards assourdissent le voisinage, à force de trinqueballer leurs cloches, pour ce que messe bien sonnée est à