Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/38

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aussi s’émut à la voix de Luther, les uns voulant seulement mettre un terme aux effroyables abus de l’Église ; les autres, en plus petit nombre, espérant, à la faveur de la réforme religieuse, poursuivre les réformes politiques tentées de siècle en siècle avant et depuis la mort d’Étienne Marcel. Ces idées émancipatrices, semées d’âge en âge par les insurrections contre le pouvoir royal, ont germé, fructifié. Jacques Almain a écrit en ce temps-ci :

« — La puissance des rois procède des peuples ; Dieu ne l’a pas conférée immuablement à certaines personnes. » (Œuv. d’Alm., p. 17)

Guillaume Pépin a dernièrement écrit : « — Les rois prodigues et cruels qui attentent à la liberté de leurs sujets rendent ainsi les révoltes légitimes ; car les sujets ont pour eux le droit divin qui créa la liberté. » — Et Guillaume Pépin ajoute : « — Que les rois se sont associé les nobles, comme Lucifer s’est associé les démons. » — Ceci peut se lire dans le livre intitulé : Sermones de destructione Ninivæ, imprimé par moi, Christian Lebrenn, à Paris, en 1525, chez maître Robert Estienne.

Le besoin de s’affranchir du triple joug de la noblesse, de l’Église et de la royauté, n’est pas seulement commun à l’Allemagne, à la Gaule ; un chancelier du roi d’Angleterre, un écrivain profond, nommé Thomas More, dans son Utopie, a jeté les bases d’une république modèle : « — Dans ce pays d’Utopie, chacun exercera son culte selon sa conscience ; les nobles et les prêtres, dépouillés de leurs privilèges exorbitants, n’ayant d’autres droits que ceux des citoyens, ne posséderont plus, au détriment des peuples, tous les biens de la terre ; chacun jouira des fruits de son travail, selon cette parole du Christ : Celui qui ne travaille pas ne doit pas manger. »

Enfin la révolution religieuse fait de tels progrès en Angleterre, que Henri VIII rejette l’autorité du pape ; la chambre des lords et des communes a reconnu, par un édit récent, Henri VIII chef de l’Église anglicane, presque entièrement conforme aux principes posés