Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/7

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Trémouille. Ces conseillers bourgeois (car ils sortaient de la bourgeoisie ceux qui poursuivirent l’œuvre de délivrance commencée par la vierge plébéienne), ces conseillers se nommaient : Jouvenel, chancelier de France ; les frères Bureau, dont l’un fut maître de l’artillerie ; Guillaume Cousinot et l’argentier Jacques Cœur ; ce dernier, fils d’un mercier de Bourges, devait être, ainsi que Jeanne Darc, victime de la honteuse ingratitude de Charles VII. Le hasard voulut que ce prince eût alors pour maîtresse Agnès Sorel ; cette jeune femme, contre les habitudes des courtisanes de son espèce, soutint de tout son pouvoir les hommes de bien dont se composait le conseil royal. Jacques Cœur devait à son négoce avec l’Orient et l’Italie une fortune énorme ; il apporta de l’ordre dans les finances, mit terme à la scandaleuse falsification des monnaies, qui rendait presque impossibles les transactions commerciales. Bureau, chargé de la direction de l’artillerie, organisa cette arme sur un pied formidable. Le connétable de Richemont, grand capitaine, mais jusqu’alors éloigné du commandement des armées par la jalousie de La Trémouille, battit les Anglais en plusieurs rencontres ; enfin, grâce à ses habiles négociations avec le duc de Bourgogne, celui-ci, en retour d’immenses concessions de territoire, rompit complètement avec l’Angleterre, et contracta une alliance avec Charles VII. Ce pacte terminait la guerre civile des Armagnacs et des Bourguignons, qui, depuis le commencement du siècle, désolait la Gaule ; ce pacte, enfin, réalisait tardivement la généreuse pensée de Jeanne Darc, qui, le jour du sacre de Charles VII à Reims, écrivait au duc de Bourgogne cette touchante lettre où elle le suppliait de mettre fin à des luttes homicides. Ce traité de paix, signé à Arras le 21 septembre 1435, fut accueilli par la France avec une joie universelle ; on espérait voir bientôt cesser les maux d’une guerre séculaire. En effet, les Anglais, privés du puissant appui des Bourguignons, restaient seuls en présence d’un peuple résolu de briser leur joug. L’année suivante (1436), Paris ouvrit ses portes au connétable de Richemont, promettant, au nom de Charles VII, clé-