Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/187

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

touchant encore à l’adolescence, n’avaient d’important que le nom ; mais ce nom était un drapeau, il fallait l’abattre. La mère de l’un de ces jeunes gens, la courageuse Jeanne d’Albret, reine de Navarre, Coligny, La Rochefoucauld, Lanoüe et le plus grand nombre des chefs protestants, conservant une invincible défiance de Catherine de Médicis, s’étaient, après l’édit de 1570, retirés à La Rochelle, forte ville de refuge, d’où ils pouvaient braver les trahisons de leur mortelle ennemie ; dès lors celle-ci et son fils n’eurent qu’une pensée incessante : attirer les chefs huguenots hors de leur retraite et les exterminer ; l’Italienne était d’autant plus résolue à hâter l’accomplissement de ce forfait inouï qu’elle voyait déjà réalisées envers une autre reine les menaces dont le révérend père Lefèvre avait été l’organe au nom du pape ; ce vicaire de Dieu sur la terre avait, le 15 février 1571, excommunié Élisabeth d’Angleterre pour crime d’hérésie et déclaré le trône vacant et dévolu à la reine catholique Marie Stuart, nièce des ducs de Guise, veuve de François II, princesse aussi fameuse par sa beauté, son esprit, sa grâce, que par sa dépravation et ses ignobles débauches. La révolte soulevée par la cour de Rome avorta ; Marie Stuart mourut sur l’échafaud, ainsi que deux des plus puissants seigneurs d’Angleterre : les ducs de Northumberland et de Westmoreland, chefs du parti catholique ; ils payèrent de leur tête leur adhésion aux complots du papisme. Malgré son insuccès, cette tentative prouvait l’audace de Rome et sa haine implacable contre les princes rebelles à sa catholique omnipotence ; enfin, cette tentative, vaine en Angleterre, dont l’immense majorité appartenait à la religion réformée, pouvait réussir en France, où les catholiques dominaient sous le hardi et ambitieux patronage des Guisards, forts de l’appui du saint-siége et du roi d’Espagne. L’Italienne se mit donc à l’œuvre ; tel était le problème à résoudre : « Attirer hors d’un refuge assuré des gens profondément défiants et sachant, par expérience, leur ennemi capable de tous les crimes. » Afin d’arriver à ce résultat, voici comment procéda Catherine de Médicis ; d’abord