Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/188

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elle écrivit à Jeanne d’Albret la lettre la plus tendre, la plus touchante, lui proposant, afin de cimenter la paix et de mettre à jamais terme aux dissensions religieuses, de donner sa fille Marguerite au jeune Henri de Béarn ; cette alliance d’un prince protestant et d’une princesse catholique serait le symbole, le gage de l’union des deux partis et de l’oubli du passé. Jeanne d’Albret, non moins flattée dans son orgueil maternel que dans son espérance de voir la paix pour toujours assurée par ce mariage, accueillit favorablement les propositions de la reine, et demanda le temps de réfléchir à une ouverture si importante. Charles IX, ayant épousé, le 26 novembre, Élisabeth d’Autriche, fille de l’empereur Maximilien, invita aux fêtes de son mariage ses cousins de Béarn et de Condé, ainsi que Coligny et autres chefs huguenots ; mais craignant de tomber dans un guet-apens, ils déclinèrent l’honneur de l’invitation royale et ne sortirent pas de La Rochelle. L’année suivante, vers le mois de mars 1571, le maréchal de Cossé vient formellement, au nom de Catherine de Médicis, proposer à Jeanne d’Albret pour son fils la main de la princesse Marguerite ; le maréchal faisait surtout valoir cette union comme un gage de réconciliation destiné à consolider la paix entre les protestants et les catholiques. Jeanne d’Albret, malgré les avantages politiques de cette union, ne peut vaincre complètement ses défiances, elle ajourne encore sa réponse ; Catherine de Médicis commençait à désespérer de pouvoir attirer hors de leur refuge ceux qu’elle voulait perdre, lorsqu’un événement inattendu vint en aide à ses desseins. Les Pays-Bas et les Flandres, poussés à bout par les exactions et la férocité de Philippe II, résolus de secouer le joug de l’Espagne et du clergé catholique, députèrent le prince Louis de Nassau à La Rochelle, le chargeant de faire à Coligny les ouvertures suivantes : « — Si la France appuyait le soulèvement des Pays-Bas en envoyant à leur secours une armée commandée par Coligny, ces provinces se sépareraient de l’Espagne ; les unes formeraient une confédération républicaine et protestante sous le protectorat du prince de Nassau,