Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 12.djvu/232

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mademoiselle, je vous procurerai le passe-temps de voir pendre ces brigands !

Parmi les brigands destinés à la potence par le sergent, et que ses soldats retenaient prisonniers à quelque distance et hors de la vue de mademoiselle de Plouernel, se trouvaient Nominoë, Salaün et Madok-le-Meunier. La jeune fille, révoltée de la réponse du soudard, se redressa fière, irritée, menaçante et le regard étincelant d’une telle indignation que, malgré son assurance, le sergent baissa les yeux :

— Écoutez-moi bien, — dit mademoiselle de Plouernel d’une voix brève et hautaine, — votre colonel, M. le marquis de Châteauvieux, réside en ce moment au château de Plouernel, chez mon frère. Je connais votre colonel. Il est homme d’honneur et ne souffrira pas que ses soldats insultent impunément les femmes ! ainsi que vous avez eu l’audace de le faire tout à l’heure.

— Mademoiselle, — balbutia le sergent, apprenant que son colonel était l’hôte du frère de mademoiselle de Plouernel, — je voulais seulement plaisanter avec cette paysanne…

— Vous mentez ! — reprit durement mademoiselle de Plouernel, — vous avez lâchement abusé de l’effroi que vos soldats inspirent à ces bonnes gens pour outrager la mariée de cette noce… Retenez bien ceci… j’enverrai aujourd’hui au château de Plouernel l’un de mes gens, chargé d’une lettre pour votre colonel ; je l’instruirai de votre indigne conduite en le priant de la châtier comme elle mérite de l’être… Il ne me refusera pas cette satisfaction !

— Ah ! mademoiselle ne voudrait pas faire ainsi arriver malheur à un vieux soldat ! — reprit humblement le sergent effrayé de la menace. — Ces rustauds ont voulu me désarmer…

— Ils avaient le droit de venger leur outrage ! Rendez-les à la liberté… réparez votre faute ; à ce prix je consens à ne pas demander votre punition à M. de Châteauvieux.

— Mettre ces gens en liberté ! — s’écria le sergent, — mais, mademoiselle…