Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 12.djvu/251

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nement la toison[1] pour vous et la grandesse pour votre maison, seule illustration qui lui manque.

— Mon cher enfant, — dit l’abbé au comte exaspéré, — il est un moyen de sortir de ces perplexités : mettez aujourd’hui, à l’instant même, Berthe en demeure de répondre catégoriquement, oui ou non, au sujet de son mariage avec le marquis.

— Hé morbleu, l’abbé… elle ne dira ni oui ni non… selon son habitude !

— Soit, mais lorsque vous l’aurez une dernière fois et en vain pressée, suppliée, conjurée, au nom de vos plus chers intérêts, de se décider aujourd’hui même, sa persistance à atermoyer encore ne vous prouvera-t-elle point sa résolution de ne pas épouser le marquis, qu’elle sacrifie sans doute à quelque indigne amour ?

— Oh ! en ce cas… malheur… malédiction sur elle ! ma patience est à bout !

— Il ne faut, mon cher enfant, maudire personne, — dit benoîtement l’abbé ; — mais il faut accomplir fermement les devoirs qui vous incombent, à vous, chef de votre illustre maison. Il faut donc, dès demain, par une mesure prompte et sévère, empêcher votre sœur de déshonorer votre nom et de se déshonorer elle-même…

— J’en jure Dieu ! — s’écrie M. de Plouernel, — si Berthe refuse encore aujourd’hui de se décider… je serai sans pitié… Oui, et dès demain…

Le comte fut interrompu par l’entrée d’un laquais qui dit à madame du Tremblay :

— M. le marquis de Châteauvieux demande à parler à madame.

— Priez M. le marquis d’entrer, — répondit madame du Tremblay. Et aussitôt après la sortie du laquais elle ajouta : — Mon neveu, pas un mot au marquis de notre entretien avant d’avoir obtenu de Berthe une réponse quelconque ! 



  1. Le collier de l’ordre de la Toison d’Or.