Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/113

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— La fin de l’oppression et de l’infortune de mes frères…

— Qu’espères-tu ?

— Le siècle de la justice, de l’amour, du bonheur et de l’égalité parmi les hommes.

— Comment réaliser ton espérance ?

— En passant le niveau sur l’ancien monde.


— Dans quel but ?

— D’abattre les trônes, les autels, les privilèges de la naissance et de la fortune : antiques monuments de l’ignorance, de l’asservissement et de l’iniquité qui se dressent menaçants au-dessus du peuple et à l’ombre desquels le peuple languit, souffre et meurt dans la détresse et dans les larmes.

— Qu’adviendra-t-il, lorsque le niveau aura passé sur le vieux monde ?

— À l’ombre séculaire, glaciale et mortelle, succédera la chaleur vivifiante de la lumière. Elle fertilisera le sol déblayé, défriché par les travailleurs. Bientôt les riches moissons couvriront de leurs gerbes ce sol labouré jusqu’en ses dernières profondeurs par une révolution féconde… et où demeureront à jamais enfouis les débris du passé.

— Es-tu complètement détachée de ce vieux monde, objet de tes malédictions ?

— Oui…

— Regarde cette tiare pontificale, cette couronne royale, regarde ces symboles de la noblesse, regarde ces sacs d’écus, emblèmes de l’aristocratie de l’argent, un jour plus redoutable peut-être que ne l’aura été l’aristocratie de naissance… Tu peux demander aux rois, aux prêtres, aux nobles, aux riches de ce monde les jouissances de la vie… en te dévouant âme et corps à ces idoles de la tyrannie, de l’exploitation et de l’imbécillité humaine…

— Ces idoles, je veux les renverser, dussé-je être écrasée sous leur chute.