Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/108

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« — Citoyens, votre pétition est parfaitement légale, nous sommes charmés de ce que nous voyons. Tout se passe ici avec un ordre admirable. L’on nous avait dit qu’il y avait du tumulte au champ de Mars ; nous sommes maintenant convaincus qu’il n’en est rien ; et, loin de vous empêcher de signer votre pétition, nous vous aiderions de la force publique, si l’on vous troublait dans l’exercice de vos droits. »

Ces paroles des commissaires de la commune de Paris sont applaudies par la foule. Ils s’éloignent, et l’on continue d’affluer à l’autel de la Patrie pour signer la pétition.

Vous le voyez, fils de Joël, rien jusqu’alors n’avait troublé cette belle et imposante journée du 17 juillet (1791). Les pétitionnaires étaient complètement étrangers aux meurtres commis dans la matinée par des scélérats soudoyés par les ennemis de la révolution, meurtres même ignorés de l’immense majorité de la population réunie au champ de Mars, où régnait tant d’ordre, que les officiers municipaux envoyés sur les lieux, par l’Hôtel de Ville, complimentèrent les pétitionnaires et, approuvant le fond et la forme de la pétition, « parfaitement légale, assurèrent les citoyens : — que si l’on tentait de s’opposer à l’exercice de leurs droits, ils seraient appuyés par la force publique… »

Et, maintenant, écoutez, fils de Joël, écoutez la fin lugubre de cette journée… Le soleil allait disparaître derrière la colline de Meudon ; huit heures du soir sonnaient à l’horloge de l’École militaire ; une partie de la foule, dont je faisais partie, regagnant ses foyers, se dirigeait vers l’issue du champ de Mars qui s’ouvre sur le Gros-Caillou ; chacun se félicitait à l’avance du résultat probable de cette grande manifestation civique ! Comment l’Assemblée ne se rendrait-elle pas au vœu des pétitionnaires exprimé avec tant de mesure et de dignité !

« — Nous obtiendrons la déchéance de Veto ! disait-on de tous côtés autour de moi. — Louis XVI, parjure, ramené de force à