Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/135

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victoire des coalisés, entre de nouveau en lutte ouverte contre l’Assemblée, maintient son veto relatif aux prêtres réfractaires, et refuse de sanctionner le décret ordonnant la formation du camp sous Paris. Roland écrit alors au roi une lettre admirable, où il lui rappelle avec une dignité sévère ses devoirs de roi, premier sujet de la loi. Roland et Servan sont destitués le 13 juin 1792. Louis XVI choisit parmi les feuillants un ministère complètement hostile à la majorité de l’Assemblée, et il dépêche en hâte Mallet-Dupan, son affidé, auprès des souverains étrangers, afin de les presser de profiter de leur première victoire. La Fayette, toujours abusé sur les secrets desseins de Louis XVI et croyant le moment du coup d’État venu, écrit de son camp à l’Assemblée, le 16 juin 1792, une lettre menaçante. Dans cette lettre, et parlant au nom de son armée, il enjoignait aux représentants du peuple de ne pas porter plus longtemps atteinte aux droits du pouvoir royal, d’ordonner la suppression des clubs, des journaux patriotes et de s’abstenir désormais de mesures révolutionnaires… L’Assemblée frémit d’indignation. Quelques membres proposent de citer La Fayette à la barre. Son procès est instruit en son absence, et il est acquitté à une immense majorité ; cet acquittement scandaleux donnait définitivement la mesure de l’énergie de l’Assemblée. Les clubs prennent alors une vaillante initiative et une série de mesures révolutionnaires, qui devaient aboutir à la journée du 10 août. Danton aux Cordeliers, Robespierre aux Jacobins, organisent d’abord, pour le 20 juin (1792), anniversaire du serment du Jeu de Paume, une imposante manifestation, pacifique encore, afin de remonter le moral de l’Assemblée, en l’assurant de l’appui populaire, et de donner à Louis XVI, traître et parjure, un dernier et solennel avertissement… parlant à sa personne, afin qu’il n’en ignore, comme disent les gens de loi. Une foule immense, à laquelle se joignent les femmes, les enfants, afin de constater le caractère inoffensif de la démonstration, s’ébranle et descend des faubourgs ; les hommes sont en armes, chaque district traîne avec lui ses ca-