Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 14.djvu/147

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pour cause la trahison permanente de Louis XVI. L’Assemblée n’osait ou ne voulait prononcer légalement la déchéance de ce traître ; le peuple se chargea de la prononcer à coups de canon…

Depuis le commencement du mois d’août, les clubs préparaient les esprits à l’insurrection. Le 4 août (1792), Danton disait aux Cordeliers :

« — Il faut en appeler au peuple, lui montrer que l’Assemblée ne peut le sauver. Il n’y a de salut que dans une insurrection générale.

» — Les mesures partielles ne sont plus de saison. L’Assemblée nationale est trop faible pour sauver la patrie, — disait Chabot aux Jacobins. — Les représentants du peuple ont déclaré la patrie en danger… ce sont donc eux qui l’y ont mise par leur inertie… quelles mesures ont-ils proposées pour la sauver ? Leur majorité absout La Fayette, repousse la demande de déchéance… Il faut que le peuple se sauve lui-même et que Paris donne l’exemple ! Je sonne le tocsin dès ce moment !

» — Il n’y a qu’une question à résoudre, — disait Robespierre, le 9 août, aux Jacobins. — Cette question est la déchéance de Louis XVI. Le peuple la prononcera ! qu’ensuite réuni dans ses comices, mais tout entier cette fois, sans distinction de citoyens actifs et passifs, il nomme une Convention nationale assez forte pour vaincre la tyrannie au dehors, mais assez dépendante du peuple pour que cette convention elle-même ne s’érige pas au dedans en pouvoir tyrannique. »

Depuis le commencement d’août, la fermentation de Paris allait croissant ; tous les patriotes, pressentant l’approche d’un grand danger public, rivalisaient de civisme pour le conjurer. L’un des hommes les plus modestes et les plus illustres de la révolution, Garat (ministre de la justice sous la Convention et duquel je reparlerai plus tard), exprimait ainsi, dans une brochure publiée postérieurement à ces événements, combien l’insurrection semblait indispensable, même aux esprits les plus calmes et les plus éclairés :