— En effet, tel est son signalement. Et d’où sais-tu ?…
— Tantôt il a fait devant moi cette proposition à la foule assemblée, proposition d’une énergie sauvage, mais digne, du moins, de ce cœur vaillant et généreux. J’ai déjà vu ce forgeron à l’épreuve.
— Quand cela ?
— Le 10 août, à la barre de l’Assemblée nationale ; il avait pris part au combat des Tuileries, et après la lutte, il fut l’un des patriotes qui coururent délivrer les Suisses prisonniers, menacés par une bande d’égorgeurs. Il a rapporté paternellement dans ses bras un pauvre enfant, fifre dans l’un de ces régiments étrangers.
— Frère, — me dit Victoria, — que penses-tu de cet homme ?
— À le juger par ses actes, c’est, je le répète, une vaillante et généreuse nature que celle de ce citoyen.
— Eh bien, il a été acclamé l’un des jurés composant le tribunal improvisé dans la prison.
— Et il a accepté ces fonctions ?
— Oui, et il les a remplies en son âme et conscience, ainsi que les autres membres du tribunal, immédiatement constitué, car la motion du forgeron de se battre à armes égales avec les prisonniers fut écartée, entre autres, par ces raisons : — « Qu’il se pouvait trouver parmi eux des innocents, et qu’ils risquaient de périr dans la mêlée. » — Puis enfin l’on observa que : — « le duel était une coutume aristocratique. » — Le jury et son président s’assemblent donc dans le greffe de l’Abbaye ; et, à ce sujet, frère, une question encore. Que penses-tu de Maillard ?
— L’huissier Maillard, l’un des héros de la Bastille ?
— Oui.
— Il n’est pas de meilleur patriote ; toujours il s’est intrépidement opposé aux excès qui pouvaient souiller la révolution ; et lors des journées des 5 et 6 octobre 1789, choisi par les femmes de Paris pour les conduire à Versailles, il a, au péril de sa vie, sauvé des