Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/104

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suffirait-il pas, hélas ! sans tant d’autres raisons bien plus graves, à me rendre odieuse une existence que…

— Ma mère, — reprend Charlotte interrompant madame Desmarais, — je t’ai dit que Jean, tout en consentant, si je le désirais absolument, à demeurer avec moi dans la maison paternelle, préférait de beaucoup vivre dans notre ménage avec sa sœur et moi…

— En effet, mon enfant, tu m’as dit cela.

— Eh bien, ma mère, je te l’avoue à regret, n’éprouvant plus, ne pouvant plus éprouver pour mon père les sentiments qui font chérir la maison paternelle, je suis résolue de m’en éloigner après mon mariage ; et maintenant, mère, pourquoi nous séparer ? — ajoute Charlotte en se jetant au cou de madame Desmarais, — pourquoi t’en irais-tu à Lyon, au lieu de rester près de nous ?

— Chère, chère enfant, — répond madame Desmarais, pleurant et embrassant sa fille, — tu combles mes vœux ; cette demande, je n’osais te l’adresser…

— Tu n’osais ?

— Et je ne sais encore si je dois accepter ton offre.

— Que dis-tu ?

— M. Lebrenn n’ignore pas que, pendant quatre ans, je me suis opposée à votre mariage, et…

— Tiens, mère, le voilà, il va te répondre ! — dit Charlotte, rayonnante en voyant entrer Jean Lebrenn, que Gertrude venait d’introduire dans le salon.

_____

Lorsque la servante se fut retirée, Charlotte dit aussitôt à son fiancé, qui saluait respectueusement madame Desmarais :

— Mon cher Jean, dans le cas où, après notre mariage, il me conviendrait de ne plus habiter la maison paternelle, et répondez-moi, de grâce, avec votre franchise habituelle, vous serait-il agréable que ma mère vînt demeurer avec nous ?