Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/329

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l’isolementoù se trouvent ces jeunes soldats, complètement inconnus les uns aux autres, venant souvent des points les plus opposés de la France. Aussi ne peut-il exister entre eux aucun de ces liens d’enfance si chers entre pays, entre natifs d’une même localité, doux et précieux liens qui aident tant le conscrit à supporter sa rude initiation à la vie militaire ; enfin, servant pour la première fois sous leurs chefs, ils ne peuvent avoir en ceux-ci cette confiance qui double les forces du soldat. N’est-ce donc pas en effet une immense supériorité que d’aller au feu guidés par des officiers en qui l’on a foi, parce qu’on a pu apprécier leur courage, leur intelligence militaire ? n’est-ce pas encore un grand avantage que de marcher côte à côte avec des camarades dont on a l’habitude de sentir les coudes (selon l’expression consacrée), camarades sur lesquels on compte de même qu’ils comptent sur vous pour un échange de fraternel appui au milieu des périls de la bataille ? Or, les bataillons de volontaires réunissent ces précieux avantages, ils offrent la cohésion des vieilles troupes ayant longtemps servi sous le même drapeau, et, comme elles, ils témoignent d’une confiance absolue dans leurs officiers. Il ne saurait en être autrement : chaque bataillon appartient au même département, chaque compagnie à la même ville, chaque section au même bourg ou au même village, aussi presque tous les volontaires se connaissent depuis l’enfance ; les officiers supérieurs ou inférieurs sont élus par les volontaires ; élection qui constate la confiance des soldats dans leurs chefs, puisqu’ils leur délèguent le commandement… Ce n’est pas tout, les volontaires savent quel patriotique intérêt chaque département, chaque ville, chaque hameau porte aux faits d’armes du bataillon. Sa gloire devient pour ainsi dire personnelle à leurs parents, à leurs amis restés au pays. Combien de lettres iront instruire le voisin un tel que son fils ou son frère s’est distingué à une action périlleuse ! Ainsi les hauts faits du volontaire deviendront l’entretien, la joie, l’orgueil de sa famille et des habitants du pays. Ce caractère de touchante solidarité se manifeste