Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/213

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Une feuille républicaine, le Journal des hommes libres, appela l’attention publique sur ces manœuvres. Il annonça « l’existence d’une nouvelle faction qui voulait une chambre perpétuelle et un président perpétuel. » Il reprocha aux journalistes thermidoriens de « menacer toujours (les patriotes) DE LEUR BONAPARTE. » Celui-ci, en effet, était fort lié avec plusieurs thermidoriens ; il était au contraire un objet de haine pour les hommes demeurés inébranlables dans leur foi républicaine. Enfin, on lisait dans le Rédacteur du 10 pluviose an VI (28 janvier 1798), l’article suivant :

« Si l’on veut connaître les ressorts que fait jouer l’Angleterre, on n’a qu’à lire l’anonyme suivante :

« De Strasbourg, le 2 pluviose.

« Le péril pour Bonaparte et pour Rewbell est des plus grands ; on a préparé de fausses pièces de conviction contre eux dans lesquelles on les accuse de vouloir attenter à la liberté de la France. On a fait recevoir des déclarations par écrit de plusieurs individus qu’on a aposté pour assurer qu’ils ont pleine connaissance du complot tramé par Bonaparte et Rewbell pour s’emparer seuls du gouvernement et faire périr les membres du Directoire et des conseils qui pourraient s’opposer à leur projet. Plusieurs de ces faux témoins ont été cherchés dans l’étranger ; mais il n’y a pas d’Italien. On a arrangé toute une correspondance semblable à celle du portefeuille de d’Entraigues, dans laquelle Bonaparte et Rewbell sont évidemment inculpés. Les coups doivent être portés dans le courant de pluviose, et même dans la quinzaine. On fait intercepter ici et dans d’autres endroits des lettres à leur adresse. La personne qui donne cet avis a vu de ses yeux les pièces fabriquées dans le cabinet de l’un des chefs de ce complot. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

L’on comprend et de reste le but de ces écrits probablement dus à la fourbe ténébreuse de Fouché. Les conspirateurs, dans le cas où leurs trames seraient dévoilées avant le coup d’État médité, comptaient de la sorte s’innocenter d’avance, en qualifiant préalablement leurs actes de calomnies et d’inventions terroristes, destinées à perdre Bonaparte et ses complices. Tels étaient les différents appels de l’opinion publique peu de temps avant l’accomplissement du coup d’État de brumaire, fatale journée, que moi, Jean Lebrenn, témoin oculaire des faits, j’ai résumés dans les scènes suivantes.


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