Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/248

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LE JÉSUITE. — Il est à Vienne avec sa femme ; elle vient de lui donner un fils, selon ce que m’a écrit dernièrement le frère du comte.

HUBERT. — Cet évêque in partibus avec lequel nous conspirions lors du procès de l’infortuné Louis XVI ?

LE JÉSUITE. — Justement, il est en ce moment à Rome.

HUBERT. — Et votre fillot, le petit Rodin ?

LE JÉSUITE. — Il grandit sous l’œil du Seigneur, et il est à Rome, au séminaire de notre compagnie.

HUBERT. — Il se montre toujours très-intelligent ?

LE JÉSUITE. — Je puis dire sans trop d’orgueil que l’on fonde quelques espérances sur lui… Au revoir.

HUBERT. — Au revoir.

Le financier conduit le révérend père Morlet jusqu’à la porte de son cabinet, puis il sonne et dit à son domestique d’introduire Jean Lebrenn.

HUBERT. — Quel peut être le motif du voyage de mon neveu à Paris ? Pourvu qu’il ne m’apporte pas de mauvaises nouvelles de ma pauvre sœur ; ses dernières lettres ne me faisaient pourtant présumer rien de fâcheux. Ah ! le voici. (Allant vers Jean Lebrenn et lui tendant la main.) Soyez le bienvenu, mon cher neveu, et d’abord rassurez-moi tout de suite au sujet de ma sœur et de ma nièce.

LEBRENN. — Charlotte et sa mère sont en parfaite santé ; elles m’ont chargé de venir vous en donner la certitude, j’ai tenu à m’acquitter de cette commission le jour même de mon arrivée.

HUBERT. — Je vous sais bon gré de cette assurance, car, je vous l’avoue, votre arrivée inattendue à Paris me causait quelque inquiétude au sujet de ma chère sœur.

LEBRENN. — Je suis venu ici pour affaires relatives à notre commerce de toiles.

HUBERT. — Il est florissant, selon ce que ma sœur m’a appris dans ses dernières lettres ; ainsi, décidément, la vie de province lui plaît ?

LEBRENN. — Nous vivons heureux et paisibles.

HUBERT. — Vous avez sans doute renoncé à la politique ? Sage résolution, mon cher neveu. Ah ! ah ! que vous disais-je autrefois ? « La république est une chimère. » Avais-je tort ? Vous venez peut-être assister à son enterrement.

LEBRENN. — Avez-vous lu dernièrement dans les journaux, citoyen Hubert, une histoire lamentable arrivée à Grenoble ?

HUBERT, surpris. — Oui, une femme mise vivante au cercueil,