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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/278

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LES MYSTÈRES DU PEUPLE.

« Maintenant, — demanda Jésus à ses disciples, — lequel de ces trois hommes vous semble avoir été le prochain (le frère) de celui qui était tombé entre les mains des voleurs ?

« — C’est celui, — répondit-on à Jésus, — qui a exercé la miséricorde envers le blessé.

« — Allez donc en paix et faites de même[1], répondit Jésus avec un sourire céleste !

L’esclave Geneviève, en entendant ce récit, ne put retenir ses larmes, car Jeane avait surtout accentué avec une ineffable douceur ces derniers mots de Jésus : « Allez donc en paix et faites de même… »

— Vous avez raison, Jeane, — dit Aurélie pensive. — Un enfant comprendrait l’enseignement de ces paroles, et je me sens émue.

— Et pourtant, cette parabole, — reprit Jeane, — est une de celles qui ont le plus irrité les princes des prêtres et les docteurs de la loi contre le jeune maître de Nazareth.

— Et pourquoi ?

— Parce que, dans ce récit, il montre un Samaritain, un païen, plus humain que le lévite, que le prêtre, puisque cet idolâtre, voyant un frère dans le pauvre blessé, le secourt, et se rend ainsi plus digne du ciel que les deux saints hommes au cœur dur… Voilà pourtant ce que les ennemis de Jésus appellent ses blasphème, ses sacrilèges !…

— Jeane, allons à la taverne ; je n’ai plus peur d’entrer en ce lieu… Des gens pour qui l’on invente de pareils récits, et qui les écoutent avec avidité, ne doivent pas être méchants.

— Vous le voyez, chère Aurélie, la parole du Nazaréen agit déjà sur vous ; elle vous donne confiance et courage… Venez… venez…

Et la jeune femme prit le bras de son amie ; toutes deux, suivie de l’esclave Geneviève, se dirigèrent vers la taverne de l’Onagre, où elles arrivèrent bientôt.

Cette taverne, bâtie carrément comme toutes les maisons d’Orient, se composait d’une cour intérieure entourée de gros piliers soute-

  1. Évangile selon saint Luc, ch. X, v. 30.