Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/97

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sait sous un épais matelas recouvert d’étoffe pourpre, ainsi qu’un grand nombre de coussins jetés çà et là… Entre deux des colonnes, et se faisant face, étaient des buffets d’ivoire incrustés d’écaille et précieusement sculptés ; sur leurs tablettes de porphyre l’on voyait de grands vases d’or ciselés, des coupes ornées de pierreries, et d’autres plus précieuses encore : ces coupes de murhe que l’on fait venir à si grands frais d’Orient, qui sont d’une sorte de pâte odorante et polie, brillant de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel (A) ; dans des bassins d’argent remplie de neige, plongeaient de petites amphores en argile de Sagonte ; de grandes cassolettes remplies de parfums, posées sur des trépieds, étaient disposées autour de la statue du dieu des jardins ; le noir les alluma, et aussitôt une vapeur balsamique, mais d’une force presque enivrante, monta des trépieds d’or et remplit la coupole…

Ces préparatifs terminés, le gigantesque Éthiopien disparut par la porte du bord de l’eau et rentra bientôt ; il tenait entre ses bras, comme on tient un enfant qui dort, une femme enveloppée de longs voiles ; plusieurs jeunes esclaves, d’une rare beauté, vêtues avec magnificence, suivaient le noir ; c’étaient les femmes esclaves de la grande dame romaine, la riche et noble Faustine : habilleuses, berceuses, coiffeuses, noueuses de sandales, porteuses de coffret, chanteuses musiciennes et autres (B).

Dès leur entrée dans le temple, elles s’empressèrent d’empiler des coussins, afin de coucher le plus mollement possible leur maîtresse, que le noir portait toujours entre ses bras… Celles des esclaves qui avaient joué de la flûte et de la lyre en se rendant au temple tenaient encore à la main leurs instruments de musique ; parmi elles se trouvaient deux jeunes et beaux affranchis grecs, de seize à dix-huit ans, reconnaissables, comme tous ceux de leur nation voués à cette condition servile, reconnaissables à leur démarche lascive, à leur physionomie effrontée, à leurs cheveux courts et frisés, ainsi qu’à leur costume aussi riche qu’efféminé. Ils portaient de grands