Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/170

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brassa avec effusion en regardant Victoria, semblant ainsi se dédommager de la sévérité maternelle.

Le capitaine Marion s’était approché de moi ; il me dit tout bas :

– C’est pourtant un bon cœur que ce Victorin ; combien il aime sa mère… combien il aime son enfant !… Il leur est certes aussi attaché que je le suis, moi, à mon ami Eustache, qui compose à lui seul toute ma famille… Quel dommage que cette peste de luxure (le bon capitaine prononçait peu de paroles sans y joindre cette exclamation), quel dommage que cette peste de luxure tienne si souvent ce jeune homme entre ses griffes !

– C’est un malheur !… Mais croyez-vous Victorin capable de l’infâme lâcheté dont on l’accuse dans le camp ? — ai-je répondu au capitaine de manière à être entendu de Tétrik, qui, parlant tout bas à Victoria, semblait lui reprocher sa sévérité à l’égard de son fils.

– Non, par le diable ! — reprit Marion, — je ne crois pas Victorin capable de ces indignités… surtout quand je le vois ainsi entre son fils et sa mère.

Le jeune général, après avoir soigneusement replacé dans le berceau l’enfant qui lui tendait ses bras, dit affectueusement au gouverneur de Gascogne :

— Salut, Tétrik !… j’aime toujours à voir ici le sage et fidèle ami de ma mère.

Puis se tournant vers moi :

– Je savais ton retour, Scanvoch… en l’apprenant, ma joie a été grande, et grande aussi mon inquiétude durant ton absence. Ces bandits franks nous ont souvent prouvé comment ils respectaient les trêves et les parlementaires…

Mais, remarquant sans doute la tristesse encore empreinte sur les traits de Victoria, son fils s’approcha d’elle, et lui dit avec autant de franchise que de tendre déférence :

– Tenez, ma mère… avant de parler ici des messages du capitaine Marion et de Scanvoch… laissez-moi vous dire ce que j’ai sur le