Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/289

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— Prends garde, — dit Tétrik pâle, sombre, menaçant, — prends garde, mon pouvoir est grand…

— Mon frère, — me dit Victoria, — ta pensée est la mienne… Parle sans crainte… moi aussi j’ai un grand pouvoir…

— Tétrik, je te soupçonnais autrefois d’avoir tuer Marion… aujourd’hui, moi, Scanvoch, je t’accuse de ce crime !…

— Malheureux insensé ! où sont les preuves de ce que tu as l’audace d’avancer ?…

— Oh ! je le sais… tu es prudent et habile autant que patient, tu brises tes instruments dans l’ombre après t’en être servi.

— Ce sont des mots, — reprit Tétrik avec un calme glacial ; — mais les preuves où sont-elles ?…

— Les preuves, — s’écria Victoria, — elles sont dans tes propositions sacrilèges… Écoute, Tétrik, voici la vérité : tu as conçu le projet d’être empereur héréditaire de la Gaule longtemps avant la mort de Victorin ; ta proposition de faire acclamer mon petit-fils comme héritier du pouvoir de son père était à la fois un leurre destiné à me tromper sur tes desseins et un premier pas dans la voie que tu poursuivais…

— Victoria, la passion vous égare. Quel maladroit ambitieux j’aurais été, moi, voulant arriver un jour à l’empire héréditaire… vous conseiller de faire décerner ce pouvoir à votre race…

— Le principe était accepté par l’armée : l’hérédité du pouvoir reconnue pour l’avenir ; tu te débarrassais ensuite de mon fils et de mon petit-fils, ce que tu as fait…

— Moi…

— Tout maintenant se dévoile à mes yeux… Cette bohémienne maudite a été ton instrument ; elle est venue à Mayence pour séduire mon fils, pour le pousser, par ses refus, à l’acte infâme aux prix duquel cette créature mettait ses faveurs… Ce crime commis, mon fils devait être tué par Scanvoch, rappelé à Mayence cette nuit-là même,