Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 3.djvu/72

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la délivrance de la Gaule allait sonner… Marik tombe entre les mains de l’immonde empereur Vespasien, par une lâche trahison… Ce nouveau héros de la Gaule, criblé de blessures, est livré aux animaux du cirque, comme notre aïeul Sylvest.

La mort de ce martyr de la liberté exaspéra les populations ; sur tous les points de la Gaule, de nouvelles insurrections éclatent. La parole de Jésus de Nazareth, proclamant l’esclave l’égal de son maître, commence à pénétrer dans notre pays, prêchée par des apôtres voyageurs ; la haine contre l’oppression étrangère redouble : attaqués en Gaule de toutes parts, harcelés de l’autre côté du Rhin par d’innombrables hordes de Franks, guerriers barbares, venus du fond des forêts du Nord, en attendant le moment de fondre à leur tour sur la Gaule, les Romains capitulent avec nous ; nous recueillons enfin le fruit de tant de sacrifices héroïques ! Le sang versé par nos pères depuis trois siècles a fécondé notre affranchissement, car elles étaient prophétiques ces paroles du chant du chef des cent vallées :

« Coule, coule, sang du captif ! — Tombe, tombe, rosée sanglante ! — Germe, grandis, moisson vengeresse !… »

Oui, mon enfant, elles étaient prophétiques ces paroles ; car c’est en chantant ce refrain que nos pères ont combattu et vaincu l’oppression étrangère. Enfin, Rome nous rend une partie de notre indépendance ; nous formons des légions gauloises, commandées par nos officiers ; nos provinces sont administrées par des gouverneurs de notre choix. Rome se réserve seulement le droit de nommer un principat des Gaules, dont elle sera suzeraine ; on accepte en attendant mieux ; ce mieux ne se fait pas attendre. Épouvantés par nos continuelles révoltes, nos tyrans avaient peu à peu adouci les rigueurs de notre esclavage ; la terreur devait obtenir d’eux ce qu’ils avaient impitoyablement refusé au bon droit, à la justice, à la voix suppliante de l’humanité : il ne fut plus permis au maître, comme du temps de notre aïeul Sylvest et de plusieurs de ses descendants, de disposer de la vie des esclaves, comme on dispose de la vie d’un