Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 4.djvu/184

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ils le sont, conduits à Clermont pour y être jugés par la curie.

— D’après des bruits très-croyables, qui nous sont parvenus, l’évêque craint, non sans raison, que la populace de Clermont ne se soulève pour délivrer ces bandits lorsqu’ils arriveront dans la cité ; les noms de l’ermite laboureur et de Ronan le Vagre sont chers à la race esclave et vagabonde ; elle se pourrait révolter pour arracher ces maudits au supplice… tandis qu’ici, dans le burg, il n’y a rien à craindre de pareil.

— Cette rebellion peut être à redouter, en effet, de la populace de Clermont.

— J’ai donc promis à l’évêque Cautin que si tu y consentais, moi, Chram, roi pour mon père en Auvergne (en attendant que je sois roi par moi-même de toute la Gaule), j’ordonnerais que ces criminels soient jugés, condamnés et suppliciés ici dans ton burg, devant ton mâhl justicier…

— Si mon bon patron l’évêque Cautin est de cet avis, je le partage… Autant que lui je me promets de jouir de ce supplice… et je donnerais, je crois, vingt sous d’or, plutôt que de voir ces scélérats échapper à la mort, ce qui pourrait arriver, si la vile populace de Clermont se soulevait en leur faveur… Mais quel rapport ceci a-t-il avec le meurtre de tes frères ?

— Tu m’as dit que ce Ronan le Vagre était guéri de ses blessures ?

— Oui.

— C’est un homme résolu ?

— Un démon… Le diable prend souvent la figure de ce Vagre, m’a dit mon patron.

— Crois-tu que si l’on disait à ce démon, après qu’il aura été condamné à un supplice terrible : « Tu auras ta grâce, à la condition d’aller tuer ensuite quelqu’un… et le meurtre accompli, vingt sous d’or de profit… » il refuserait cette offre ? Dis, quel Vagre la refuserait ?…