Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/51

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chambellan, l’archidiacre et vos hommes de guerre ; un de vos messagers portera ma lettre.

— Il y a là sur cette table ce qu’il faut pour écrire. Assieds-toi…

Loysik s’assit et se mit à écrire avec sérénité ; cependant sa joie était si grande d’avoir heureusement réussi dans cette difficile occurrence, que sa main vacillait un peu ; Brunehaut l’observait, sombre et silencieuse ; elle lui dit : — Tu trembles… vieillard ?

— C’est vrai, mais excusable ; la satisfaction d’avoir épargné tant de maux à mes frères m’émeut et ma main tremble.

— As-tu fini ?

— Voici la lettre… Lisez.

Brunehaut lut, et reprit en roulant le parchemin : — Ces adieux sont simples, dignes et touchants ; je comprends de mieux en mieux la puissante et dangereuse influence que tu exerces sur ces gens-là… Ils sont le bras, tu es la tête. Tout à l’heure ils ne seront plus qu’un corps sans tête… et, après la guerre, je les réduirai plus facilement. Tu n’as rien à me demander ?

— Rien… sinon de hâter mon supplice.

— Je serai généreuse ; ton inébranlable fermeté me plaît ; je le fais grâce de la torture, et te laisse le choix de ta mort…

— Faites-moi simplement couper la gorge…

— De quelle manière ?

— Avec un rasoir ; j’indiquerai le bon endroit à l’ami Pog ; je suis assez chirurgien pour renseigner votre bourreau.

— Tu seras content… Allons, cherche bien, moine… Tu n’as rien de plus à me demander ?

— Si, — répondit Loysik en se dirigeant lentement vers la console d’ivoire où était le médaillier, — je voudrais emporter cette grande médaille de bronze ; je la garderais seulement pendant le peu de temps qui me reste à vivre… Il me serait doux de mourir les yeux attachés sur cette glorieuse effigie.

— Quoi ! cette médaille à laquelle en entrant ici tu as adressé je