Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/52

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ne sais quelle invocation, qui m’a fait te prendre pour un fou ? Voyons-la donc, cette médaille… Ce sont de ces choses antiques que l’on a par curiosité. Vraiment… cette femme est belle et fière sous son casque de guerrière… Qu’il y a-t-il de gravé au-dessous : Victoria, empereur. Une femme empereur ? Qu’est-ce à dire ?

— Ce titre souverain lui fut décerné après sa mort…

— C’était tard… Et pendant sa vie, que faisait-elle donc ?

— Elle aimait son fils…

— Ah ! elle avait un fils ? Elle était sans doute de race royale ?

— Elle était de race plébéienne.

— Mais sa vie… quelle fut sa vie ?

— Simple… austère, illustre ! Sa grande âme se lisait dans ses traits, d’une sérénité grave… Figure auguste que le bronze a reproduite pour la postérité.

— Moine… assez sur sa figure… Quelle fut sa vie ?…

— Sa vie fut celle d’une chaste épouse… d’une mère sublime… d’une vaillante Gauloise. Elle ne quittait sa modeste demeure que pour suivre son fils à la guerre ou aux camps. Les soldats l’adoraient ; ils l’appelaient leur mère. Elle élevait virilement son fils dans le saint amour de la patrie, et lui donnait l’exemple des plus hautes vertus. Son ambition…

— Cette femme austère était ambitieuse !

— Autant qu’une mère peut l’être pour son fils, elle avait l’ambition de faire de ce fils un grand citoyen, l’ardent désir de le rendre digne d’être un jour élu chef de la Gaule par le peuple et par l’armée.

— Élevé par une mère… si incomparable, il fut élu ?

— Citoyens et soldats l’acclamèrent d’une seule voix. En le choisissant, ils glorifiaient encore Victoria… Victoria, sa mâle éducatrice ! Ces qualités brillantes qu’ils honoraient en lui, c’était son œuvre à elle ! L’élection du fils consacrait l’influence souveraine de la mère… Oh ! véritablement souveraine par le courage, le génie,