Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 5.djvu/66

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

naient entre leurs mains le petit Mérovée : — Ne tuez pas cet enfant… qu’on le conduise dans ma tente… Vous, attendrez mes ordres… vous ne savez pas la gloire qui vous attend, — ajouta Clotaire II avec une expression de férocité sardonique. Puis, sa tournant vers Warnachaire : — Viens, allons recevoir dignement cette fille de roi, cette femme de roi, cette aïeule et bisaïeule de rois, Brunehaut, reine de Bourgogne et d’Austrasie… Viens… viens…




Quel est ce bruit ? on dirait les pas sourds et les cris lointains d’une grande multitude… Grande est la multitude en effet qui s’avance vers le village de Ryonne, où sont campés les guerriers de Clotaire II. Cette multitude, d’où vient-elle ? Oh ! elle vient de loin, des montagnes du Jura d’abord ; puis en route elle s’est grossie d’un grand nombre d’habitants des lieux qu’elle traversait ; des esclaves, des colons, des hommes des cités, des femmes, des enfants, des vieillards, tous ont quitté leurs champs, leurs huttes, leurs villes ; colons et esclaves, au risque de la mutilation, de la prison et du fouet au retour ; citadins, au risque de la fatigue de ce voyage rapide, qui, pour les uns, durait depuis deux jours, pour les autres, depuis un jour, un demi-jour, deux heures, une heure, selon qu’ils s’étaient joints à la foule depuis plus ou moins longtemps. Mais cette foule si empressée, qui l’attirait ainsi ? Ces mots répétés de proche en proche : — C’est la reine Brunehaut qui passe… on l’emmène prisonnière pour la livrer au fils de Frédégonde… — Oui, telle était la haine, le dégoût, l’horreur, l’épouvante qu’inspiraient en Gaule ces deux noms, Frédégonde et Brunehaut, qu’un grand nombre de gens n’avaient pu résister à la curiosité terrible de voir et de savoir ce qu’il allait advenir de la capture de Brunehaut par le fils de Frédégonde. Cette multitude s’avançait donc vers le village de Ryonne… Une cinquantaine de guerriers à cheval ouvraient la marche, puis venait le conné-