— Tu le sais ; c’est l’évêque de Nantes et Draco, sire de Castel-Redon.
— Hier, j’ai façonné une figurine pareille à celle-ci ; a-t-elle été, selon mes ordres, placée entre les dents d’un pendu au moment où il rendait le dernier soupir ?
— Cela a été exécuté. Une de mes serves avait, hier, frappé mon baillif ; on l’a pendue, ce matin, à mes fourches seigneuriales, et au moment où elle rendait l’âme, mon bourreau lui a mis entre les dents la poupée de cire.
— Alors, selon ma promesse, tes ennemis seront bientôt en ton pouvoir ; mais pour compléter le charme, ces deux autres figurines, auxquelles j’ai enfoncé sept aiguilles magiques à l’endroit du cœur, seront portées par toi sous les racines d’un arbre planté au bord d’une rivière où un homme aura été noyé.
— C’est facile ; il y a de gros vieux saules plantés au bord de ma rivière ; souvent mes hommes y noient les mariniers récalcitrants au péage de mes droits de navigation.
— Cet envoûtement magique doit être fait par toi. Tu placeras ces figurines à l’endroit désigné, cette nuit, au coucher de la lune, et par trois fois tu prononceras les noms de Jésus, d’Astaroth et de Judas ; alors le charme aura sa toute-puissance.
— Hum ! je n’aime guère le nom du Christ mêlé à tout ceci... Tu veux, peut-être, me pousser à quelque sacrilége ?
Un sourire sardonique effleura les lèvres blanches d’Azenor-la-Pâle, elle reprit : — J’ai au contraire mis le charme magique sous l’invocation du Christ ; j’ai prononcé un verset de l’Évangile à chaque aiguille que j’ai enfoncée dans ces poupées.
— Si tu ne m’avais pas poussé à tuer mon chapelain, j’aurais su de lui si je commettais ou non un sacrilège !
— Tu l’as tué parce que tu le soupçonnais, un peu tard, ce saint homme, d’être le père de Guy... ton second fils.
— Tais-toi ! — s’écria Neroweg VI d’un ton courroucé ; — tais--