Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 6.djvu/237

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donnant au comte les deux figurines de cire : — Tes deux ennemis, dont voici l’emblème, le sire de Castel-Redon et l’évêque de Nantes, tomberont bientôt en ton pouvoir, si tu places toi-même ces figures magiques, selon ce que je t’ai dit, en prononçant trois fois les noms de Judas, d’Astaroth et de Jésus.

— Hum ! le nom de Jésus me coûte fort à prononcer en cette sorcellerie, tu me pousses peut-être à un sacrilége, — ajouta Neroweg VI en hochant la tête et prenant presque avec crainte les deux figurines. — Enfin, à ce soir pour le philtre ?

— Oui.

— Tu as l’enfant ; rien ne te manque ?

— Rien...

— Mais où donc est-il l’enfant du serf ?

— Je te l’ai dit : là, dans ce réduit.

Neroweg VI, toujours défiant, alla vers la tourelle, souleva le rideau et vit le petit Colombaïk, fils de Fergan-le-Carrier, couché sur le sol ; l’innocente créature dormait profondément au pied d’un meuble chargé de vases de formes bizarres. Les murailles de la tourelle, pavée de dalles, s’élevaient nues jusqu’au plafonnement de son étage supérieur, dont le sol était au niveau de la plate-forme du donjon. Neroweg VI, après avoir un instant contemplé l’enfant, dit à Azenor : — À ce soir, puisque rien ne te manque plus pour le philtre magique. — Et ce disant, il sortit, en fermant à double tour la serrure, dont il garda la clef.




Eberhard-le-Tricheur, l’un des écuyers du seigneur de Plouernel, l’attendait au dehors du réduit d’Azenor, en compagnie de Thiebold, prévôt justicier de la seigneurie ; celui-ci dit à Neroweg VI, qui, soucieux, descendait lentement la spirale de l’escalier de pierre : — Seigneur, le châtelain de la maison forte de la Ferté-Mehan a signé l’abandon de son fief du Haut-Menil, au troisième coin que le bour-