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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 7.djvu/184

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— Mes bons amis… faites-moi grâce de la vie ! — reprit l’évêque dont les dents claquaient de terreur. — Oh ! je vous en supplie ! faites-moi seulement grâce de la vie ! je renoncerai à l’épiscopat, je quitterai cette ville, vous ne me reverrez jamais ; mais la vie… oh ! laissez-moi la vie !… grâce… grâce !

— As-tu fait grâce à mon frère Gerard, qui a eu les yeux crevés par ton ordre ? — s’écria un communier en saisissant le prélat par le collet de sa casaque et le secouant avec fureur, — dis, lui as-tu fait grâce ?

— As-tu fait grâce à mon ami Robert-du-Moulin, poignardé par Jean, ton noir ? — ajouta un autre insurgé. — Et ces deux accusateurs, saisissant le prélat qui se débattait en vain et qui, plutôt que de marcher, se laissait traîner agenouillé, s’écrièrent : — Viens, viens ! tu vas mourir au grand jour ! — Tu vas mourir à la face du soleil, qui a vu tes crimes et ton parjure !…

Et Gaudry, accablé de coups et d’outrages, fut poussé hors du cellier ; en vain il criait : — Ayez pitié de moi !… Je vous rendrai votre commune… je vous le jure… je vous le jure !…

Les insurgés répondaient : — Rendras-tu aux veuves leurs maris ? — Rendras-tu aux orphelins leurs pères ?

— Empêcheras-tu le sang des nôtres d’avoir coulé dans ce jour funeste ?

— Ah ! tu crois qu’après avoir été traître, homicide ; qu’après avoir exaspéré à force d’iniquités, de défis, de menaces, un peuple inoffensif qui ne demandait qu’à vivre paisible selon la loi jurée, il suffit de crier : pitié ! pour être absous ?

— Non, non ; la clémence est sainte, mais l’impunité est impie !

— Ciel et terre ! — s’écria Fergan, — lorsque Dieu ne fait pas justice… le peuple la fait !

— Oui, oui ! — À mort l’évêque ! — À mort ! — Le prélat, au milieu de ces cris furieux, fut entraîné hors du cellier ; soudain une vois glapissante, dominant le tumulte, s’écria : — Quoi ! le fils de