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» Pour l’amour de ma miette,
» Pour l’amour de ma Gueulette. »

L’abbé Reynier, d’une voix défaillante. — Ce truand… me… crêve les entrailles… Mylio, dans le lointain. — Bonsoir, dom ribaud !

Peau-d’oie, à l’abbé, en se soulevant péniblement d’une main, et de l’autre menaçant toujours le moine de la pointe de l’épée en s’éloignant à reculons. — Bonsoir, dom ribaud ! voici la moralité de l’aventure : « Souvent celui-là qui met le poisson en poêle… le voit manger par autrui. »




La nuit et les deux tiers du jour se sont passés depuis les aventures de la veille. Vous voyez une longue avenue d’arbres odoriférants conduisant à la Cour d’amour, autrement dite le plaid sous l’ormeau ; ce plaid se tient dans le jardin du château d’Églantine, vicomtesse de Séligny : de chaque côté de l’avenue, des fossés, entourés de balustres de pierre, sont remplis d’une eau limpide où nagent des cygnes et d’autres beaux oiseaux aquatiques. Tous amoureusement unis par couples, ils sillonnent les eaux avec grâce ; les poissons du canal, brillants de pourpre et d’or, les oiseaux jaseurs, qui volettent d’arbre en arbre, sont aussi tous réunis par couples ; un pauvre tourtereau dépareillé, perché au faîte d’un arbre desséché, gémit seul d’un ton plaintif. Cette longue allée, coupée par le pont du canal, aboutit à une immense pelouse de gazon émaillé de mille fleurs, au milieu de laquelle s’élève un magnifique ormeau formant un dôme épais, impénétrable aux rayons du soleil ; sous cet ormel se tient la cour d’amour, tribunal libertin, qui prend aussi le nom de Chambre des doux engagements ; il est présidé par une Reine de beauté, représentant Vénus. Cette reine, c’est Marphise, marquise d’Ariol ; les autres dames-juges sont : Déliane, chanoinesse de Nivelle, Églantine, vicom-