Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 7.djvu/254

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

guste, fondé pour veiller avec une sévère sollicitude sur les crimes d’amour et les flétrir, les punir même au besoin, se montrerait digne de sa mission. (Elle s’adresse à la comtesse.) Douce amie, avez-vous cité le criminel à notre barre ?

La comtesse Ursine. — Oui, je l’ai cité devant la Cour des doux engagements, et, soit audace, soit conscience de son forfait, il s’est rendu à la citation ; je demande qu’il plaise à la cour de le livrer aux douze victimes de sa félonie, elles tireront de lui une vengeance éclatante. (Avec impétuosité.) Il faut que désormais ce monstre soit…

Marphise, se hâtant d’interrompre la comtesse. — Douce amie, la cour, avant d’appliquer la peine, doit entendre l’accusé ; où est-il ?

La comtesse Ursine. — Il s’est rendu à notre citation en compagnie d’un gros vilain homme ventru, à trogne rouge. Le témoignage de cet homme peut être, selon l’accusé, nécessaire à sa défense. Ils sont tous deux enfermés dans la geôle d’amour, là-bas, au fond du jardin.

Marphise. — Nous requérons notre Sénéchal des marjolaines et notre Baillif de la joie des joies d’aller chercher le coupable et de l’amener ici, enchaîné, selon la coutume, avec des guirlandes fleuries.

Le Sénéchal et le Baillif se munissent de deux longs rubans roses et bleus où sont noués, çà et là, des bouquets de fleurs, et se dirigent vers la tonnelle ombreuse pour y chercher le prisonnier ; une grande agitation règne dans la foule : les avis sont partagés sur le degré de culpabilité du criminel, mais l’extrême curiosité de le voir est unanime. Bientôt Mylio-le-Trouvère paraît, conduit par le Sénéchal des marjolaines et le Baillif de la joie des joies. Peau-d’Oie reste modestement en dehors du prétoire. La jeunesse et la bonne mine de l’accusé, son renom de poëte, semblent disposer en sa faveur la partie féminine de l’assemblée.

Marphise, à Mylio, d’une voix imposante. — Tu es accusé, par-devant la Chambre des doux engagements, d’un crime inouï dans les fastes de l’amour.