Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voisis, le château des comtés de ce pays, vaste édifice, dont l’une des tours dominait la place dite « du Faubourg. » Le premier étage de ce donjon, éclairé par une longue et étroite fenêtre ogivale, formait une vaste salle circulaire ; là était assis auprès d’une table Charles-le-Mauvais ; le jour venait à peine de paraître, le prince disait à l’un de ses écuyers :

— A-t-on fini de dresser l’échafaud ?

— Oui, sire… vous pouvez le voir d’ici par la fenêtre…

— Et les bourgeois… quelle contenance ?

— Ils sont consternés, toutes les boutiques sont closes, personne ne circule dans les rues.

— Et le populaire ?… les corporations des métiers ?

— Sire, depuis l’exécution d’hier, il ne reste guère de menues gens…

— Mais enfin ce qui reste ?

— Ce qui reste est consterné, épouvanté, comme la bourgeoisie.

— Néanmoins, que mes Navarrais fassent bonne garde aux portes de la ville, aux remparts et dans les rues, qu’ils tuent sans miséricorde tout bourgeois, manant ou artisan, qui oserait mettre le nez hors de chez lui ce matin.

— L’ordre est déjà donné, sire ; il sera exécuté.

— Et les chefs de ces maudits Jacques ?

— Toujours impassibles, sire.

— Sang du Christ ! il faudra bien qu’ils remuent tout à l’heure… L’on s’est procuré un trépied ?

— Oui, sire.

— Que tout soit prêt pour sept heures sonnant.

— Tout sera prêt, sire.

Charles-le-Mauvais réfléchit un instant, et dit en montrant une médaille émaillée de son chiffre, placée près de lui sur une table :

— L’homme arrêté cette nuit, aux portes de la ville, et qui m’a envoyé cette médaille par l’un de mes archers, est-il arrivé ?