Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/221

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organisant leurs bandes, est surtout de les lancer en masse contre les Anglais au nom de la patrie ravagée par leurs bandes, et de repousser enfin l’étranger de notre sol. Le triomphe est certain si l’on profite de l’exaltation des Jacques en la dirigeant vers ce but sacré : le salut et la délivrance du pays ! Voilà pourquoi, sire, maître Marcel a voulu opérer la jonction des Jacques avec les forces dont vous disposez.

— Oh ! oui, — reprend Charles-le-Mauvais avec un sourire sardonique, — notre ami Marcel avait bien judicieusement choisi mes auxiliaires.

— Que voulez-vous dire ?…

— Ce que je veux dire ?… Attends…

Le roi de Navarre frappe de nouveau sur un timbre ; l’écuyer reparaît et sort après avoir attentivement écouté quelques mots que le prince lui dit à l’oreille.

— Sire, — dit Mahiet, — voici bien des mystères et des chuchottements ; se trame-t-il quelque nouvelle trahison contre moi ?

— Bon… — reprend Charles-le-Mauvais en haussant les épaules, — folle est ton idée !… Je désire seulement me précautionner afin que notre entretien reste calme et mesuré comme il convient.

— Sire, ai-je donc manqué jusqu’ici de calme et de mesure ?

— Jusqu’ici… non… mais tout à l’heure, il se pourrait que ta modération fût mise à une rude épreuve… et je…

La rentrée de deux écuyers jeunes et robustes, accompagnant le confident de Charles de Navarre, interrompt les dernières paroles de ce prince et avant que Mahiet, dont les mains étaient déjà liées, ait pu faire un mouvement, il est terrassé malgré son énergique résistance, car d’un coup de pied il envoie rouler un des écuyers à dix pas de lui ; ce que voyant, Charles-le-Mauvais s’écrie :

— Tudieu ! mon Hercule !… quelle vigueur d’athlète !… Ai-je tort de me précautionner contre les suites de notre entretien, malgré tes assurances de rester calme et mesuré ?