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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/249

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entretien avec la femme de l’échevin, elle se dit : — L’offre de l’échevin cacherait donc un piége ?… Oh ! je ne peux croire encore à une si horrible trame !

— Mon Dieu ! — s’écria Denise avec amertume, — et pourtant mon oncle, malgré nos pressentiments, nous répond toujours lorsque nous lui parlons des soupçons que nous inspire maître Maillart : — « Il n’est pas méchant homme ; mais il subit aveuglément l’influence de sa femme qui est dévorée d’envie et de vanité… »

— Chère Alison ! — reprit Marguerite après quelques instants de réflexion, — vous n’avez pas interrogé le messager qui vous a apporté cette lettre ?

— Si fait, madame… je lui ai demandé en quel endroit il avait laissé messire Rufin.

— Que vous a-t-il répondu ?

— Que l’écolier se trouvait dans une taverne voisine de l’arcade Saint-Nicolas lorsqu’il lui avait remis ce billet…

Au moment où Alison prononçait ces derniers mots, deux hommes encapés jusqu’aux yeux entrèrent dans la chambre. Marguerite reconnut son mari et Mahiet-l’Avocat d’armes, lorsque ceux-ci se furent débarrassés de leurs casaques.

— Enfin, te voilà… te voilà ! — s’écria Marguerite ne pouvant maîtriser sa profonde émotion et se jetant au cou de Marcel, tandis que Denise tendait vivement sa main à son fiancé qui la pressa respectueusement contre ses lèvres ; il portait pardessus ses armes un surcot noir, depuis qu’il avait vu supplicier sous ses yeux son frère Mazurec-l’Agnelet ; les traits de Mahiet, pâles et tristes, témoignaient de la constance de son chagrin. Marguerite, après avoir tendrement embrassé son mari qui lui rendit ses caresses avec effusion, lui dit, contenant à peine son angoisse, en lui remettant la lettre de Rufin-Brise-Pot :

— Mon ami, prends connaissance de ce billet, la bonne Alison vient de l’apporter en toute hâte.