Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 8.djvu/294

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un joug odieux sans résistance possible. Tibert et Saint-Yon, maîtres de la grande boucherie près le Châtelet ; Caboche, écorcheur de bêtes à la tuerie de l’Hôtel-Dieu, marchaient d’accord avec les frères Legoix et Jean de Troyes. C’était en 1411, l’on apprenait chaque jour à Paris, en outre des forcenneries des Anglais, les ravages des Armagnacs dans le Vermandois, où ils se trouvaient en force, sous les ordres du duc de Bourbon, du comte d’Alençon et de Clignet de Brabant, amiral de France ; les maisons et les biens de ceux du parti bourguignon que ne protégeaient pas les remparts des cités étaient pillés, les femmes étaient violées, puis éventrées, les hommes suspendus au-dessus de brasiers ardents jusqu’à ce que ces malheureux eussent fait connaître l’endroit où ils cachaient l’argent qu’on les soupçonnait de posséder. Les Armagnacs pénètrent en Champagne, en Artois, et désolent ces provinces. Charles VI continuant d’âtre en démence, sauf quelques rares retours de raison, et le duc de Guyenne, son fils aîné, n’inspirant aucune confiance, le duc de Bourgogne est nommé généralissime par le conseil royal, le duc d’Orléans et autres chefs du parti des Armagnacs sont mis hors la loi ; la guerre civile redouble de fureur. Le duc de Bourgogne rassemble son armée à Douai, et étend ses quartiers jusqu’à Montdidier ; le duc d’Orléans, le comte d’Armagnac, prennent position depuis Beaumont jusqu’à Clermont en Beauvoisis. Une défection considérable de l’armée du duc de Bourgogne retarde ses mouvements ; les Armagnacs s’approchent rapidement de Paris, occupent Pantin, Saint-Ouen, Montmartre, mettent le pays à sac, à feu et à sang. Le duc de Bourgogne, laissant Paris découvert, négociait afin de s’assurer l’appui du roi d’Angleterre, tandis que le duc d’Orléans négociait de son côté avec ce prince dans les mêmes intentions ; mais le roi d’Angleterre, préférant l’alliance des Bourguignons, leur envoie des renforts. Ils traversent la Seine à Meulan, arrivent à Paris le 29 octobre 1411, sans rencontrer les Armagnacs ; ceux-ci, n’ayant pas défendu le passage de la rivière, ont forcés de battre en retraite, après de sanglants combats