Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/106

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Réponds sincèrement, hardiment ; tu sortiras triomphante de cette nouvelle épreuve… »

l’évêque de chartres fait signe à Jeanne de s’approcher de la table, et lui dit d’une voix grave, presque menaçante : — Jeanne, nous sommes envoyés de par le roi pour t’examiner et t’interroger… n’espère pas nous abuser par des mensonges.

jeanne. — Je n’ai jamais menti !… je vous répondrai… Mais vous êtes de savants clercs, moi, je ne sais ni A ni B… je ne puis vous dire autre chose, sinon que j’ai mission de Dieu de faire lever le siége d’Orléans[1]

frère séguin, aigrement. — Tu prétends que le Seigneur Dieu t’envoie devers le roi ?… L’on ne doit point te croire ; les saintes Écritures défendent d’ajouter foi aux paroles des personnes qui se disent inspirées d’en haut, si elles ne donnent un signe certain de la divinité de leur mission… Or, quel signe peux-tu donner de la tienne ?

jeanne. — Les signes que je donnerai seront mes actes.

maître éraut. — Quels seront ces actes ?

jeanne. — Ceux que je dois accomplir par la volonté de Dieu.

françois ganivel. — Mais, enfin, quels sont-ils, ces actes ?

jeanne. — Ils sont au nombre de trois.

frère séguin. — Quel est le premier ?

jeanne. — La levée du siége d’Orléans ; après quoi je chasserai les Anglais de la Gaule.

maître éraut. — Ensuite ?

jeanne. — Je ferai sacrer le dauphin à Reims.

  1. Voir pour l’interrogatoire et les réponses textuelles de Jeanne, la Chronique de la Pucelle, manuscrit de la bibliothèque de l’Institut, no 245, ap. J. Quicherat, vol. IV, p. 209 ; — et le Procès de réhab., t. III, p. 204 à 206.