Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/236

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et les conséquences de cette abjuration), elle jura sur les saints Évangiles de reprendre et de ne plus quitter désormais ses habits de femme… Le lendemain du jour où elle les eut revêtus, on exerça sur elle une tentative de viol !…Vous ne croyez pas à une telle horreur, chers lecteurs ? Lisez ces paroles de l’un des déposants à ce sujet :

« … Si, après avoir renoncé et abjuré, Jeanne a repris ses habits d’homme, c’est que les Anglais lui avaient fait ou fait faire en la prison beaucoup d’outrages lorsqu’elle eut repris ses habits de femme ; et, de fait, je l’ai vue éplorée, son visage plein de larmes, défiguré, en telle sorte que j’en eus compassion… » (T. III, p. 5, Quicherat.)

Plus loin, un autre témoin dépose :

« … Et celui qui parle sait de certain que, de jour et de nuit, Jeanne était couchée ferrée par la ceinture et par les jambes de deux paires de chaînes traversant les pieds de son lit et tenant à une grosse pièce de bois. Il dépose que la pauvre Pucelle lui révéla (à lui son confesseur) qu’après son abjuration on l’avait, en prison, violemment tourmentée, molestée, battue et deschoulée, un milord d’Angleterre l’ayant voulu forcer (violer) ; et pour ce, elle avait repris ses habits d’homme. » (T. III, p. 7.)

Oui, Jeanne, après cette tentative de viol, reprit ses habits d’homme, malgré son serment… Cette récidive fut l’une des causes capitales de sa condamnation à mort !

Un mot encore, chers lecteurs, sur l’évêque de Beauvais, Pierre Cauchon, et le chanoine Nicolas Loyseleur, d’abominable mémoire, tous deux instigateurs des iniquités dont fourmille ce procès ecclésiastique. Vous venez de voir à l’œuvre ces deux prêtres, vous les y verrez encore. Vous croyez peut-être à quelque exagération de notre part ? Lisez et jugez :

« … Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, depuis qu’il fut retiré à Rouen devint l’âme damnée des princes d’Angleterre ; ils exploitèrent à leur profit son ambition désordonnée ; ils se firent payer, par sa complaisance dans le procès de la Pucelle, l’expectative qu’il avait d’occuper l’archevêché de Rouen, alors en vacance. La promesse qu’il avait reçue d’eux est constatée par les publications récentes de sir Harris Nicolas (Proceedings and ordinances of the privy concil of England, London 1845). On lit au tome IV de ce recueil, p. 10, une délibération conçue en ces termes : Il a été convenu que l’on écrirait une lettre, sous le sceau privé, adressée au souverain pontife, afin d’obtenir de lui la translation de Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, au siège métropolitain de l’archevêché de Rouen. » (Ap. Jules Quicherat, t. I, p. 1-2.)

Vous avez frémi d’horreur, chers lecteurs, à la pensée de cette