Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/254

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un juge. — Quels étaient ces conseils ?

jeanne darc. — Je l’ai déjà dit… ces conseils étaient de me conduire en pieuse et honnête fille ; alors Dieu m’inspirerait, m’aiderait, pour le salut de la France.

l’inquisiteur de la foi. — De sorte que vous affirmez non-seulement avoir vu des yeux de votre corps vous apparaître une vision surnaturelle sous la figure de saint Michel ; mais vous affirmez, en outre, que cette figure était réellement celle de ce personnage sacré ?

jeanne darc. — Je l’affirme… puisque je l’ai entendu de mes oreilles… puisque je l’ai vu de mes yeux…

l’évêque cauchon, aux greffiers. — Minutez textuellement cette réponse.

un greffier. — Oui, monseigneur.

Le chanoine Loyseleur, dont les traits sont toujours soigneusement cachés sous sa cagoule, et qui tient, par surcroît de précaution, un mouchoir sur le bas de son visage, se lève et va parler à l’oreille du prélat ; celui-ci se frappe le front, comme si les paroles de son complice lui rappelaient un oubli. Loyseleur regagne son siège.

l’évêque cauchon. — Jeanne, lorsqu’après avoir été prise devant Compiègne, l’on vous a conduite au château de Beaurevoir, vous vous êtes précipitée de l’une des tours en bas ?

jeanne darc. — C’est la vérité.

l’évêque cauchon. — Quelle était la cause de cette résolution désespérée ?

jeanne darc. — J’avais entendu dire dans ma prison que j’étais vendue aux Anglais… j’ai mieux aimé risquer de me tuer que de tomber entre leurs mains ; j’ai tenté de m’échapper en sautant du haut en bas de la tour.

l’inquisiteur. — Est-ce par le conseil de vos voix que vous avez agi de la sorte ?

jeanne darc. — Non… Elles me le déconseillaient, me disant « de prendre courage, que Dieu viendrait à mon secours, et qu’il