— Si des saintes lui ont apparu ! lui ont parlé !
— Comment un évêque du bon Dieu ose-t-il l’accuser !
— À mort ! à mort ! la sorcière !
— À mort ! à mort ! la diablesse ! et vive la vieille Angleterre !
— Au bûcher la p… des Armagnacs !… Nous la verrons en chemise !
Jeanne Darc, à ces cris féroces, à ces infâmes insultes, sent redoubler sa terreur ; elle songe à l’ignominie qui l’attend avant son supplice si elle n’abjure pas. Abjurer, c’est échapper à cette honte mortelle ; abjurer, c’est recouvrer la liberté ! Jeanne Darc se résigne donc ; mais sa loyauté, sa conscience, se révoltent encore en ce moment suprême, et au lieu de renier complètement ses erreurs, elle murmure, toujours agenouillée, ces mots d’une voix faible :
— J’ai dit sincèrement aux juges toutes mes actions ; j’ai cru agir de par Dieu ! Je ne veux accuser ni mon roi, ni personne… Si j’ai péché, je suis seule coupable, et je m’en rapporte à Dieu !
l’évêque cauchon, d’une voix éclatante. — Subterfuges ! subterfuges ! Oui ou non, tiens-tu pour vrai ce que les prêtres, tes seuls jurés en matière de foi, déclarent de tes actes et de tes paroles ? paroles et actes déclarés fallacieux, homicides, sacrilèges, idolâtres, hérésiarques et diaboliques, réponds ! (Silence de Jeanne.) Une seconde fois, je te requiers de répondre !… (Silence de Jeanne.) Une troisième fois, je te requiers de répondre… Tu te tais ?
Oui, l’héroïne se taisait, torturée par les déchirements d’une lutte intérieure et suprême. — Abjure ! — lui disait son instinct de conservation et de liberté. — N’abjure pas, ne mens pas… courage, courage ! — lui criait sa conscience ; — soutiens la vérité jusqu’à la honte, jusqu’à la mort ! — Et l’infortunée, se tordant les mains, demeurait muette et en proie à d’horribles angoisses !
l’évêque cauchon, effrayant d’hypocrite mansuétude et s’adressant au peuple. — Hélas ! mes très-chers frères ! vous voyez l’endurcissement opiniâtre de cette infortunée ! elle repousse sa tendre mère