Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 9.djvu/298

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l’évêque cauchon, lisant. — « Troisièmement, moi, Jeanne, je confesse avoir grièvement péché en portant un habit dissolu, difforme et déshonnête, contre la décence de la nature ; en portant mes cheveux taillés en rond, à l’exemple des hommes, contre toute pudeur de femme. » (S’adressant à Jeanne.) Confesses-tu cet abominable péché ?

jeanne darc. — Je le confesse !

l’évêque cauchon, lisant. — « Quatrièmement, moi, Jeanne, je confesse avoir grièvement péché en portant armures de guerre avec jactance, en désirant avec cruauté l’effusion du sang humain. » (S’adressant à Jeanne.) Le confesses-tu ?

jeanne darc, se tordant les mains. — Mon Dieu ! confesser cela ! confesser cela ! ! !

l’évêque cauchon. — Quoi ! tu hésites ? (À voix basse.) Prends garde ! le bûcher t’attend !

jeanne darc frissonne et répond d’une voix défaillante. — Je le confesse !

l’évêque cauchon, d’une voix retentissante. — Jeanne, tu confesses avoir désiré avec cruauté l’effusion du sang humain ?

jeanne darc. — Je le confesse !

D’innombrables cris d’horreur s’élèvent dans la foule ; les soldats anglais menacent Jeanne de leurs armes. Quelques hommes ramassent des pierres afin de lapider l’héroïne, mais ils hésitent, de crainte de lapider pareillement les juges. Les imprécations redoublent contre la pénitente.

— C’est par pure cruauté que cette harpie guerroyait !

— Elle voulait se soûler de sang !

— Elle l’avoue !

— Et l’Église lui pardonne !

— Ah ! je ressentais grande pitié pour cette misérable mais maintenant, je dis comme les Anglais : À mort cette tigresse altérée de sang !