À l’aspect de Claude Gérard, dame Honorine s’avança vivement à sa rencontre, et, la joue empourprée de colère, s’écria brutalement :
— Savez-vous que voilà dix minutes que je suis à faire ici le pied de grue à vous attendre ? où étiez-vous ? Mais répondez donc !… où étiez-vous ?
L’instituteur paraissait à peine entendre cette femme ; il passa sa main sur son visage décomposé, inondé de sueur, en murmurant à voix basse avec accablement :
— Plus d’espoir ! mon Dieu !… Cet argent est perdu !
Il ne me restait aucun doute : Basquine et Bamboche n’avaient plus rien à craindre. L’abattement de Claude Gérard me le disait assez.
Dame Honorine, aussi stupéfaite que courroucée du silence de l’instituteur, s’écria :
— Voilà qui est étonnant !… je parle à M. Claude Gérard… et il ne me répond pas…
— Pardon, Madame Honorine, pardon, — dit Claude Gérard d’une voix altérée en revenant à lui, — j’allais…
— Qu’est-ce que cela me fait, à moi, où vous alliez ?… Voilà un quart d’heure que je vous attends.
À ma grande surprise, l’instituteur ne dit pas un mot du vol dont il venait d’être victime. Surmontant son émotion, il répondit à dame Honorine avec autant de douceur que de déférence :
— Je suis fâché de vous avoir fait attendre, Madame Honorine… j’ignorais que vous dussiez venir… Qu’y a-t-il pour votre service ?
— D’abord, je voudrais bien savoir pourquoi vous n’avez pas rangé et balayé à fond la sacristie, comme je vous l’avais ordonné ce matin ?
— J’ai commencé à balayer, mais l’heure de ma classe est venue, madame Honorine, et…
— Je me moque bien de votre classe, moi !… la sacristie passe avant votre classe, peut-être. Est-ce qu’on ne vous paye pas pour la tenir propre ?
— Il est vrai, Madame Honorine.