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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés II (1850).djvu/76

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— Quand il ne sera plus malade.

— Il est donc plus malade que moi ?

— Certainement… il ne m’a pas encore reconnu…

— Mais puisque je peux me lever, j’irai avec toi le soigner, — dit Basquine. — L’an passé, ma sœur Élisa a été malade… je l’ai bien veillée avec maman.

— Ça ne se peut pas, — dis-je à Basquine, — il y aurait du danger pour toi…

— Mais pour toi, il y en a aussi ?

— Non, moi je ne viens pas comme toi d’être malade…

Après un nouveau silence, Basquine me dit d’un air pensif :

— Mon Dieu ! que je voudrais que papa vienne bientôt, pour qu’il nous emmène d’ici, toi, Bamboche et moi.

 
 

Plusieurs jours après cet entretien, et ce ne fut pas le seul de ce genre, dans lequel je lui parlai de mon compagnon dans les termes les plus favorables, Basquine me parut éprouver peu à peu une affection croissante pour Bamboche ; celui-ci, pour la première fois depuis l’invasion de sa maladie, éprouva un mieux sensible ; la connaissance lui revint, il me reconnut… et après avoir paru rassembler ses souvenirs, son premier mot fut :

— Où est-elle ?

— Elle est ici… et, comme toi… elle a été très-malade.

— Elle aussi… — s’écria-t-il avec une angoisse profonde, — et maintenant ? ajouta-t-il en se tournant vers moi tout tremblant.

— Maintenant elle est sauvée… — lui dis-je.

Bamboche ne me répondit rien, il fondit en larmes ; je me jetai dans ses bras, il me serra sur son cœur autant que le lui permettaient ses forces épuisées ; nous restâmes ainsi quelques minutes, muets, attendris, pleurant tous deux.

Bamboche, rompant le premier le silence, me dit avec une expression de reconnaissance impossible à rendre :

— Je n’avais presque pas de connaissance… mais pourtant… je te voyais quelquefois, comme dans un rêve… aller et ve-