Page:Sue - Les mystères de Paris, 10è série, 1843.djvu/346

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la considération publique, vous terminerez dans le repos et dans l’aisance une vie qui doit servir d’enseignement à tous… »

Ce serait là une belle utopie à réaliser, utopie à laquelle le noble Monthyon a donné seulement un commencement d’exécution ; il était impossible à un homme d’accomplir ce qu’une société seule peut faire ! Aussi l’œuvre de Monthyon est-elle, comme nous le disions, incomplète ; nous n’en voulons pour preuve que le fait suivant :

L’année dernière, un homme fut condamné pour vol, compliqué d’escalade et d’effraction, à dix années de fer ; cet homme avait obtenu le prix Monthyon quelques années avant. Comme le président lui demandait quelle cause, après sa conduite passée, avait pu l’amener au crime, il répondit que sa pauvreté n’ayant plus rien à espérer de la vertu, puisque le prix Monthyon ne se donnait qu’une fois, il avait appelé le vol à son aide.

Le hideux spectacle du châtiment, nous l’avons dit antérieurement, est peu efficace quant aux résultats ; mais quels heureux et salutaires effets ne rejailliraient pas de l’imposant tableau des récompenses ? De quelle noble envie ne seraient point aiguillonnés tous les cœurs ? Et comme devant ce pavois où serait élevé le vieil ouvrier comme autrefois le vieux chef franc, les jeunes gens se feraient le serment de devenir dignes par leur courage et leur vertu d’y monter à leur tour.

La tête qui grimace sanglante sur les planches de l’échafaud n’inspire pas l’horreur du crime ; la couronne de chêne déposée sur le front chauve du travailleur honnête ferait chérir la vertu.

L’imposante cérémonie de la distribution des croix d’honneur du camp de Boulogne avait enthousiasmé