Page:Sue - Les mystères de Paris, 8è série, 1843.djvu/256

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bête brute, ou plutôt comme un voyou sans père ni mère, abandonné sur le pavé de Paris, je ne connaissais ni Dieu ni diable, ni bien ni mal, ni fort ni faible. Quelquefois le sang me montait aux yeux… je voyais rouge… et si j’avais un couteau à la main, je chourinais… je chourinais… j’étais comme un vrai loup, quoi !… je ne pouvais pas fréquenter autre chose que des gueux et des bandits ; je n’en mettais pas un crêpe à mon chapeau pour cela ; fallait vivre dans la boue… je vivais rondement dans la boue… je ne m’apercevais pas seulement que j’y étais… Mais quand M. Rodolphe m’a eu dit que, puisque, malgré les mépris de tout le monde et la misère, au lieu de voler comme d’autres, j’avais préféré travailler tant que je pouvais et à quoi je pouvais, ça montrait que j’avais encore du cœur et de l’honneur… tonnerre !… voyez-vous… ces deux mots-là, ça m’a fait le même effet que si on m’avait empoigné par la crinière pour m’enlever à mille pieds en l’air au-dessus de la vermine où je pataugeais, et me montrer dans quelle crapule je vivais… Comme de juste alors j’ai dit : Merci ! j’en ai assez ; je sors d’en