Page:Sue - Les mystères de Paris, 9è série, 1843.djvu/118

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— Mais elle est si jeune ! à cet âge-là on n’a pas de défense, et puis la peur, les mauvais traitements, les mauvais conseils, les mauvais exemples, l’acharnement qu’on mettra peut-être à lui faire faire mal ! Mon pauvre frère avait prévu tout ce qui arrive, lui ; il me disait : — « Est-ce que tu crois que si cette mauvaise femme et ton mari s’acharnent à perdre cette enfant, il ne faudra pas qu’elle y passe[1] ? » — Mon Dieu ! mon Dieu ! pauvre Catherine, si douce, si aimante ! et moi qui, cette année encore, lui voulais faire renouveler sa première communion !…

— Ah ! vous avez bien de la peine… Et moi qui me plaignais — dit la Lorraine en essuyant ses yeux. — Et vos autres enfants ?

— À cause d’eux j’ai fait ce que j’ai pu pour vaincre la douleur et ne pas entrer à l’hôpital, mais je n’ai pu résister… Je vomis le sang trois ou quatre fois par jour, j’ai une fièvre qui me casse les bras et les jambes, je suis hors d’état de travailler… Au moins, en étant

  1. Nous rappellerons au lecteur que le père ou la mère sont admis à faire inscrire leur fille sur le livre de prostitution au bureau des mœurs.