Page:Sue - Les mystères de Paris, 9è série, 1843.djvu/186

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lieu d’envoyer cette malheureuse enfant chez madame Georges, ne l’ai-je pas gardée près de moi… ? Aujourd’hui je n’aurais qu’à lui tendre les bras… Pourquoi n’ai-je pas fait cela ? pourquoi ? Ah ! parce qu’on ne fait jamais le bien qu’à demi, parce qu’on n’apprécie les merveilles que lorsqu’elles ont lui et disparu pour toujours… parce qu’au lieu d’élever tout de suite à sa véritable hauteur cette admirable jeune fille qui, malgré la misère, l’abandon, était, par l’esprit et par le cœur, plus grande, plus noble peut-être qu’elle ne le fût jamais devenue par les avantages de la naissance et de l’éducation…, j’ai cru faire beaucoup pour elle en la plaçant dans une ferme… auprès de bonnes gens… comme j’aurais fait pour la première mendiante intéressante qui se serait trouvée sur ma route… C’est ma faute… c’est ma faute. Si j’avais fait cela, elle ne serait pas morte… Oh ! si… je suis bien puni… je l’ai mérité… mauvais fils… mauvais père !…

Murph savait que de pareilles douleurs sont inconsolables, il se tut.

Après un assez long silence, Rodolphe reprit d’une voix altérée :