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que je ne réponds pas que la seule présence de ces quatre honorables spectateurs, qui viendront, pour ainsi dire, scruter mon phénomène jusqu’au fond de sa piscine, ne blesse très-sensiblement cette même pudeur dont je le glorifie !

Un gémissement lamentable de l’homme-poisson sembla confirmer les paroles de la Levrasse ; mais celui-ci, se retournant vers Léonidas Requin, reprit d’un ton grave et pénétré, comme s’il eût voulu le préparer à un douloureux sacrifice :

— C’est égal, mon garçon, quoi qu’il nous en coûte, nous devons nous soumettre à l’investigation du public ; notre piscine doit être de verre, afin que votre probité phénoménale ne puisse être suspectée… Résignez-vous donc, mon ami ; que votre pudeur se sacrifie encore une fois.

À ces mots, nouveau et douloureux gémissement de Léonidas, qui plongeant dans sa piscine par-dessus les oreilles, disparut complètement.

— Soyez tranquilles. Messieurs, — dit la Levrasse d’un air capable au public qui commençait à s’inquiéter, — il va revenir à la surface de l’eau pour respirer un air pur, à l’égal du cachalot et autres baleines.

Puis, s’adressant aux gendarmes :

— Gendarmes, laissez approcher quatre personnes… Mais je dois les prévenir que je retire la permission que j’ai donnée, si ces honorables personnes s’entêtent à vouloir payer dix sous… un droit que j’ai l’honneur de leur offrir gratuitement.

Il était impossible de se montrer plus généreux que la Levrasse.