prennent où ils peuvent… D’ailleurs voler les voleurs n’est pas voler… la Levrasse était un voleur.
— Enfin, puisqu’il se trouve que nous n’avons pris que ce qu’on nous devait, Basquine a raison, ça vaut mieux, — dis-je à Bamboche. — Quant au trésor, ça nous est égal de n’être plus riches. Est-ce que tu y tenais beaucoup, toi ?
— Tonnerre de Dieu !… oui, j’y tenais… pour vous et pour moi ! — s’écria Bamboche.
— Mais ça nous est égal… à nous.
— Ça ne me l’est pas à moi… tiens, — me répondit brusquement Bamboche.
— Ainsi Basquine et moi… nous ne te sommes de rien… tu ne penses qu’à cet argent perdu, — dis-je à notre compagnon, — tu n’es pas juste, non plus.
Bamboche fut sensible à ce reproche, car, d’un grand coup de pied, envoyant au loin le sac vide et les sacoches, il reprit gaîment :
— Ah ! bah ! tant pis… vous avez raison, vous autres… Quand je serai là une heure à me manger le sang… à quoi bon ?… nous sommes volés… eh bien ! nous sommes volés… Embrasse-moi, Basquine… embrasse-moi, Martin ; ramassons les jaunets ; vive la joie ! et en avant la vie buissonnière !
Nous nous embrassâmes tous trois dans une accolade demi-sérieuse, demi-comique, assez semblable à celle qui unit, sur les bords du grand lac, les trois libérateurs de la Suisse, et nous répétâmes :
— Vive la joie et en avant la vie buissonnière !