Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 3-4.djvu/241

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— Mais… — répondit la gouvernante, de plus en plus surprise, — je ne sais… ce que vous voulez me demander… Pourquoi étiez-vous cachés dans ce bois ?

— Tenez, ma chère dame… — reprit chaleureusement Bamboche, — je vais vous parler franchement ; nous sommes tous trois sans parents… sans ressources… nous venons de bien loin… nous faisions partie d’une troupe de saltimbanques, nous avons vu que cet état tournait mal pour nous… que nous y deviendrions de mauvais sujets… nous nous sommes sauvés ; vous êtes riche… donnez-nous les moyens d’être honnêtes gens… nous ne demandons qu’à travailler… qu’à bien faire… Nous avons été si malheureux jusqu’ici, voyez-vous, que si peu qu’on s’intéressera à notre sort, sera beaucoup pour nous… Allons, ma chère dame,… un coin dans votre maison, en attendant que vous nous ayez mis en apprentissage où vous voudrez… ça nous est égal… Tout ce que nous désirons, c’est apprendre un état pour gagner un jour bravement notre vie… Nous avons du courage, nous avons eu tant de misère, qu’il n’y aura pas de métier trop dur pour nous… mais il nous faut avant tout vivre avec d’honnêtes gens… Vrai, il est temps… il est plus que temps…

La gouvernante restait muette, interdite.

Les enfants, se regardant les uns les autres, ne paraissaient pas comprendre les paroles de Bamboche ; il s’était pourtant exprimé avec une si louable résolution, avec une émotion si sincère, que deux fois je vis des larmes rouler dans ses yeux.

Voulant venir à son aide, je repris :