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notre vie, à un acte de violence que rien n’autorise, et qui n’a pas même le prétexte d’une vengeance légitime, c’est la cause, c’est l’honneur du peuple dont moi et ces jeunes gens faisons partie, que nous défendons. Rassurez-vous donc, Monsieur, tout ce que des gens de cœur peuvent humainement tenter, nous le tenterons pour faire respecter votre personne et votre propriété.

Puis Claude Gérard revint dans nos rangs, recommanda de nouveau la garde du pont, défendit qu’aucun de nous l’accompagnât, afin d’éviter une collision, et seul il s’avança vers la bande à moitié ivre qui n’était plus qu’à quelques pas de nous. Il fallut le sang-froid, la résolution, l’incroyable autorité que possédait naturellement Claude Gérard pour dominer la fureur de nos auxiliaires, lorsqu’il voulut leur faire comprendre la déloyauté et l’indignité de l’action qu’ils allaient commettre. L’un de ces malheureux, dans son exaspération, porta un coup de fléau à Claude Gérard ; mais, quoique blessé, celui-ci, doué d’autant de vigueur que de courage, terrassa son adversaire, le mit hors de combat, et continua d’en appeler aux généreux sentiments de ses adversaires. Le plus grand nombre fut sourd à ses exhortations, et marcha tumultueusement vers le pont ; mais une minorité assez considérable, cédant à l’influence de Claude Gérard, se rangea de son côté.

Que dire de plus ? Après une lutte heureusement courte et peu meurtrière, nos agresseurs se débandèrent en désordre de crainte d’une seconde attaque. Nous passâmes la nuit sous les arbres du parc, et, le lende-